L’absence du trésorier adjoint en arrêt maladie et celle d’un autre membre du comité d'entreprise à l'époque peuvent, dans certains cas, constituer une circonstance exceptionnelle justifiant le dépassement par le trésorier de ses heures de délégation et leur paiement par l’employeur. Une solution transposable au CSE ?
Possibilité de dépasser le crédit d’heures de délégation en cas de circonstances exceptionnelles
Les élus titulaires du CSE disposent d’un crédit d’heures de délégation qui leur permet d’exercer leur mandat en étant rémunérés par l’employeur. Ces heures sont, de plein droit, considérées comme du temps de travail et rémunérées comme tel par l’employeur (c. trav. art. L. 2315-10).
Ce nombre d’heures, fixé par mois, ne peut être dépassé et rémunéré qu’en raison de circonstances exceptionnelles (c. trav. art. R. 2314-1). Ces heures prises en dépassement du crédit d’heures ne bénéficient alors pas de la présomption de bonne utilisation justifiant le paiement immédiat par l’employeur. Celui-ci peut, s’il a un doute ou s’il estime que le dépassement n’est pas justifié par des circonstances exceptionnelles, refuser de les payer.
Or les circonstances exceptionnelles ne sont pas définies par les textes. Ce sont donc les juges qui les déterminent au cas par cas. Ont ainsi été considérées comme des circonstances exceptionnelles un projet de restructuration ou une démission collective de membres du comité (cass. soc. 6 juillet 1994, n° 93-41705, BC V n° 228 ; cass. soc. 4 décembre 2002, n° 00-43717 D).
Illustration avec une nouvelle affaire soumise à la Cour de cassation.
Dépassement de 8 heures du quota mensuel pour pallier l’absence d’autres élus
Dans cette affaire le salarié, élu titulaire et exerçant la fonction de trésorier du comité d’établissement en place à l’époque, avait dépassé ses heures de délégation en raison de l’absence de 2 membres du comité, dont celle du trésorier adjoint en arrêt maladie.
Ce dépassement, de 8 heures sur deux mois, ne lui avait pas été rémunéré par l’employeur qui contestait la circonstance exceptionnelle. Selon lui, le comité était composé de 7 titulaires et de 2 suppléants, de sorte qu’il n’était pas en sous-effectif pour l’exercice de ses activités.
Le salarié réclamait devant les juges le rappel de salaire pour ces 8 heures, ainsi que des indemnités de repas liées à ces heures. Il a obtenu gain de cause devant le conseil de prud’hommes saisi en référé.
Une circonstance exceptionnelle admise s’agissant d’un comité d’entreprise
Cette décision est confirmée par la Cour de cassation.
Selon elle, le conseil de prud’hommes pouvait considérer que l’absence de plusieurs membres du comité d’établissement, dont celle du trésorier adjoint en arrêt maladie, était une circonstance exceptionnelle suffisante pour qu’il condamne l’employeur au paiement d’une provision sur ces heures en attendant le jugement sur le fond de l’affaire (c. trav. art. R. 1455-5 et R. 1455-7).
Une solution transposable au CSE ?
Cet arrêt relatif aux heures de délégation des membres du comité d'entreprise pourrait s’avérer aussi applicable aux élus du CSE faisant face à de telles circonstances exceptionnelles.
Rappelons néanmoins que désormais les élus peuvent mutualiser leurs heures de délégation et les cumuler d’un mois à l’autre, ce qui n’était pas le cas à l’époque des faits (c. trav. art. L. 2315-8 et L. 2315-9). L’élu du CSE faisant face à de telles absences pourrait potentiellement utiliser les heures de délégation du ou des salariés absents, s’il leur en reste.
De quoi influencer la jurisprudence ? L’avenir nous le dira.
Cass. soc. 12 mai 2021, n° 19-21124 D ;
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