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  • Photo du rédacteurDavid Sanglier

Les gains ou pertes de change sont un élément de la plus ou moins-value de cession

Le Conseil d’État vient d’écarter le pourvoi en cassation formé à l’encontre d’une décision de la cour administrative d’appel de Versailles ayant jugé qu’une perte de change subie à l’occasion d’une cession de titres est un élément de la plus ou moins-value réalisée.


Alors que la cour administrative d’appel de Versailles a jugé que la perte de change constatée lors de la cession de titres de participation doit être prise en compte pour déterminer la plus ou moins-value en résultant (CAA Versailles 19-12-2019 no 17VE01521), le Conseil d’État a refusé d’admettre le pourvoi en cassation formé à l’encontre de cet arrêt.


En l’espèce, la société requérante avait cédé des titres de participation détenus au sein d’une société américaine, et avait comptabilisé cette opération en distinguant, d’une part, la perte de change subie, d’autre part, la plus-value calculée par différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition des titres, tous deux convertis en euros d’après le cours en vigueur au jour de la cession. Elle avait en conséquence déduit la perte de change de son résultat imposable au taux plein.


L’administration avait remis en cause cette déduction, estimant qu’il convenait d’inclure la perte de change dans le calcul du résultat de cession des titres.


La comptabilité offre un choix pour le traitement d’une cession de titres en devises


Sur le plan comptable, les entreprises réalisant une cession d’immobilisation libellée en devises ont le choix entre deux solutions.


Il est possible de comptabiliser le gain ou la perte de cession de manière globale par différence entre le prix de vente converti en euros au jour de la cession et la valeur nette comptable du bien convertie en euros d’après le cours de change au jour de l’acquisition.


Mais les entreprises peuvent aussi décomposer l’opération comme comprenant :


  • d’une part, un gain ou une perte de change déterminé par différence entre la valeur nette comptable du bien cédé convertie en euros, d’après le cours de la devise en vigueur au jour de la cession, et son montant converti en euros au jour de l’acquisition ;

  • d’autre part, un résultat de cession issu de la différence entre le prix de cession et la valeur nette comptable du bien cédé, calculé d’après le cours de la devise au jour de la cession.

Le juge fiscal refuse de tirer les conséquences du choix comptable exercé


L’application de l’une ou l’autre de ces options admises sur le plan comptable comporte un enjeu fiscal important pour les cessions de titres de participation détenus depuis au moins deux ans qui relèvent du régime de quasi-exonération.


En effet, l’incorporation du résultat de change au résultat de cession entraîne, en cas de constatation d’une plus-value à long terme, une modification de l’assiette de la quote-part de frais et charges de 12 % imposable sur la plus-value, sous réserve que l’entreprise réalise une plus-value nette de cession au titre de l’exercice. Si l’opération dégage une moins-value, le résultat de change influence son montant, à la hausse ou à la baisse, et reste alors sans conséquence fiscale puisque les moins-values à long terme ne peuvent donner lieu à aucune déduction fiscale.


La société requérante qui avait comptabilisé la cession en décomposant l’opération dans ses comptes prétendait au contraire qu’il convenait de tirer les conséquences fiscales de ce choix. La perte de change devait donc, selon elle, être prise en compte dans le résultat imposable au taux de droit commun, sans affecter la plus-value à long terme relevant du régime de quasi-exonération.


L’arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles qui faisait l’objet du pourvoi en cassation énonce le principe suivant lequel les gains et pertes de change associés aux cessions d’éléments quelconques de l’actif constituent une composante de la plus-value ou moins-value réalisée, mais n’apporte pas d’élément sur les motivations de cette position.

Le Conseil d’État entérine le fait que le choix exercé par l’entreprise en comptabilité de dissocier la comptabilisation de l’écart de change et du résultat de cession proprement dit ne produit pas d’effet sur le plan fiscal.


Il s’écarte sur ce point des principes qui avaient fondé une décision rendue à propos du régime fiscal des primes de remboursement attachées à des emprunts obligataires convertibles. S’appuyant sur les dispositions de l’article 38 quater de l’annexe III au CGI, qui prévoient l’application au plan fiscal des définitions édictées par le plan comptable général, le Conseil d’État avait en effet jugé que le choix effectué par l’entreprise sur leur mode de comptabilisation, conforme au PCG et aux usages des entreprises, produit toutes ses conséquences fiscales en l’absence de disposition législative ou réglementaire propre à la détermination de l’assiette de l’impôt et incompatible avec les règles comptables (CE 13-7-2011 no 311844).


Notons pour terminer que la Cour de justice de l’Union européenne a eu l’occasion de juger comme étant conforme au principe de liberté d’établissement, prévu à l’article 49 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), la législation suédoise interdisant la déduction de moins-values subies sur des titres de participation, même lorsque ces moins-values proviennent de pertes de change (CJUE 10-6-2015 aff. 686/13).


Sous réserve que cette position retenue à propos de la législation suédoise soit transposable à la législation française, la position prise par le Conseil d’État dans la présente affaire ne pourrait pas être critiquée sur le terrain de la liberté d’établissement.

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