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Photo du rédacteurDavid Sanglier

Cession de créance par le sous-traitant et paiement direct : attention à l’antériorité

Le paiement direct fait par le maître de l’ouvrage après la cession de sa créance par le sous-traitant ne libère pas l’entreprise principale de sa dette envers la banque bénéficiaire de la cession de créance.


Une entreprise titulaire d’un marché de travaux publics sous-traite certains travaux. Le 26 avril 2016, le sous-traitant établit une facture au nom de l’entreprise principale. Le 30 juin 2016, cette facture est réglée par paiement direct du maître de l’ouvrage sur un compte à créditer ouvert auprès d’une société tierce conformément aux mentions de la facture. Or, le 6 mai 2016, le sous-traitant avait cédé sa créance à un établissement de crédit, qui avait notifié, le 10 mai 2016, cette cession à l’entreprise principale. Non payée, la banque réclame le paiement de sa créance à l’entreprise principale. La cour d’appel a fait droit à sa demande. L’entreprise principale conteste en invoquant le caractère libératoire du paiement direct effectué par le maître de l’ouvrage.


La Cour de cassation rejette le pourvoi. D’une part, l’établissement de crédit ou la société de financement cessionnaire d’une créance par remise de bordereau peut, à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée de payer entre les mains du signataire du bordereau ; à compter de la notification, le débiteur ne se libère qu’auprès du cessionnaire (C. mon. fin. art. L 313-28 ancien). D’autre part, lorsque la créance est cédée ou nantie au titre d’un marché public, la notification doit être faite entre les mains du comptable assignataire (C. mon. fin. art. R 313-7). Or cette obligation ne s’applique qu’aux cessions de créances détenues sur des personnes morales de droit public.


Le débiteur étant l’entreprise principale, la Haute Juridiction en déduit que la notification n’avait pas à être faite entre les mains du comptable assignataire, le maître de l’ouvrage n’étant ni débiteur cédé ni défendeur à l’action en paiement. La règle d’antériorité s’appliquait donc et le paiement par le maître de l’ouvrage à la société tierce n’était pas libératoire.

à noter : Dans les marchés publics, le maître de l’ouvrage peut être tenu au paiement direct du sous-traitant en application de l’article 6 de la loi 75-1334 du 31 décembre 1975. Toutefois, selon la Cour de cassation, le paiement direct n’emporte pas délégation parfaite et laisse subsister la dette de l’entrepreneur principal (Cass. 3e civ. 15-1-1992 : Bull. civ. III no 20 ; Cass. 3e civ. 3-12-2008 no 07-19.997 FS-PBI : BPIM 1/09 inf. 22). En l’espèce, le maître de l’ouvrage a payé auprès d’un tiers la créance du sous-traitant le 30 juin 2016, alors que celui-ci l’avait cédée en mai 2016 à la Caisse d’épargne. La dette étant celle de l’entreprise, la notification de la cession de créance n’avait pas à être faite au comptable assignataire comme le soutenait le pourvoi. La cession était donc opposable à l’entreprise principale, qui avait soutenu, sans le démontrer, que le paiement à la société tierce concernait une cession de créance antérieure à celle faite au profit de la Caisse d’épargne. Si la solution est indiscutable, il reste que la créance est payée deux fois : par le maître de l’ouvrage et par l’entreprise principale condamnée. Le sous-traitant a-t-il procédé à deux cessions ? Qui est redevable du remboursement : le sous-traitant qui aurait cédé deux fois la même créance, ou le tiers qui a été honoré par le maître de l’ouvrage ? Il est probable que, si la délégation avait été parfaite, cette situation ne se serait pas produite.

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