La Commission des études comptables de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC) a précisé le traitement comptable, dans les comptes consolidés d'un groupe, des écarts de réévaluation sur les titres de participation détenus par la société mère, qui figurent dans les comptes individuels de cette dernière (CNCC, EC 2021-14, juillet 2021).
Réévaluation de titres de participation au sein d'un groupe
Réévaluation pratiquée par la société mère et deux de ses filiales
Le groupe A établit des comptes consolidés selon les dispositions du règlement CRC 99-02 (qui a été, pour rappel, remplacé par le règlement ANC 2020-01 pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2021).
Au 31 décembre 2020, les sociétés suivantes du groupe A ont procédé à la réévaluation de l’ensemble de leurs immobilisations corporelles et financières dans leurs comptes individuels respectifs (les immobilisations incorporelles ne peuvent pas être réévaluées, PCG art. 214-27), et ont inscrit l'écart de réévaluation au passif de leur bilan (c. com. art. L. 123-18) : - la société A, entité mère du groupe A ; - la société B, entité faisant l’objet d’une intégration globale (IG) dans les comptes consolidés du groupe A ; - la société C, entité faisant l’objet d’une mise en équivalence (MEE) dans les comptes consolidés du groupe A.
Maintien, dans les comptes consolidés, des écarts de réévaluation générés par la réévaluation libre
En particulier, la société A a, ainsi, réévalué l’ensemble de ses immobilisations corporelles et financières, incluant les titres de participation détenus sur les sociétés B et C ainsi que sur d’autres entités non contrôlées et non consolidées par le groupe.
Conformément à l’option offerte par le paragraphe 302 du règlement CRC 99-02, le groupe a décidé de ne pas éliminer les écarts de réévaluation générés par la réévaluation libre dans ses comptes consolidés, mais d’étendre la réévaluation à l’ensemble des entités du périmètre de consolidation.
Dans ce cas, la réévaluation doit alors être effectuée selon des méthodes uniformes pour l'ensemble des immobilisations corporelles et financières détenues par les entités A, B et C dans les comptes consolidés du groupe.
Dans ce contexte, la Commission des études comptables de la CNCC a été saisie d'une question relative au traitement comptable, dans les comptes consolidés du groupe A, des écarts de réévaluation constatés par la société A dans ses comptes individuels sur les titres de participation qu’elle détient (société B, société C et entités non contrôlées et non consolidées).
Pour y répondre, la Commission a distingué les écarts de réévaluation constatés par la société A dans ses comptes individuels sur chaque catégorie de titres détenus (titres B, titres C et autres titres).
Traitement comptable de l’écart de réévaluation sur les titres B
Principes essentiels de l'intégration globale : rappels
B est une entité contrôlée et consolidée par intégration globale (IG). L'intégration globale est une des trois méthodes de consolidation. Elle est applicable aux entités sous contrôle exclusif (CRC, règlt 99-02, § 110).
Les deux autres méthodes sont l'intégration proportionnelle, pour les entités sous contrôle conjoint, et la mise en équivalence, pour les entités sous influence notable (voir ci-après).
VALEURS FIGURANT AU BILAN CONSOLIDÉ
Dans l'intégration globale, le bilan consolidé reprend les éléments du patrimoine de la société consolidante, à l'exception des titres des sociétés consolidées à la valeur comptable desquels est substitué l'ensemble des éléments actifs et passifs constitutifs des capitaux propres de ces sociétés déterminés d'après les règles de consolidation (c. com. art. R. 233-3).
ÉCART D'ÉVALUATION
On appelle « écart d’évaluation » la différence entre la valeur d’entrée d'un élément dans le bilan consolidé et la valeur comptable du même élément dans le bilan de l’entreprise contrôlée.
Lors de la première consolidation d’une entreprise contrôlée exclusivement, hormis le cas particulier des regroupements entre entreprises sous contrôle commun, la valeur d’entrée des éléments identifiables de son actif et de son passif est évaluée (CRC, règlt 99-02, §§ 211 et 21121) :
- pour les biens non destinés à l’exploitation, à leur valeur de marché à la date d’acquisition ou, en l’absence de marché, à leur valeur vénale nette des coûts de sortie ; - pour les biens destinés à l’exploitation, à leur valeur d’utilité pour l’entreprise consolidante (qui correspond, généralement, à leur valeur de remplacement).
ÉLIMINATION DES OPÉRATIONS INTERNES
S'agissant de l'élimination des opérations entre entreprises consolidées par intégration globale, l'élimination des profits et pertes internes portant sur des actifs a pour conséquence de les ramener à leur valeur d'entrée dans le bilan consolidé (coût historique consolidé) (CRC, règlt 99-02, § 2610).Élimination, dans les comptes consolidés, de l'écart de réévaluation sur les titres B comptabilisé chez A
ÉLIMINATION DES TITRES DE PARTICIPATION B POUR LA TOTALITÉ DE LEUR VALEUR
Eu égard aux principes précités, le bilan consolidé du groupe A reprend les éléments du patrimoine de la société consolidante A, à l'exception des titres de participation B, auxquels sont substitués les actifs et passifs constitutifs des capitaux propres de la société B.
Dès lors, les titres de participation B sont éliminés pour la totalité de leur valeur, y compris pour la portion relative à la réévaluation libre. En effet, si l’écart de réévaluation des titres B n’était pas éliminé dans les comptes consolidés, il ferait double emploi avec l’intégration des actifs immobilisés de B dans les comptes consolidés, eux-mêmes réévalués puisque (voir ci-avant) :
- la réévaluation libre est étendue à l’ensemble des entités consolidées du groupe ; - B a également procédé à cette réévaluation dans ses propres comptes individuels.
MÉTHODE À SUIVRE
En pratique, dans les comptes consolidés, il convient donc :
- d’éliminer l’écart de réévaluation sur les titres B comptabilisé dans les comptes individuels de A ; - puis, en contrepartie, de ramener les titres de participation B à leur valeur comptable historique (voir ci-avant) ; - et enfin, d’intégrer les actifs de B dans les comptes consolidés du groupe selon la méthode de l’intégration globale, pour leur valeur réévaluée qui se substitue à leur valeur nette comptable (VNC) dans les comptes consolidés préalablement à la réévaluation.
Quid s'il existe des écarts d'évaluation résultant de la première consolidation de B dans les comptes consolidés ?
CALCUL DE L'ÉCART DE RÉÉVALUATION : NON RETRAITEMENT DES ÉCARTS D’ÉVALUATION LIÉS À L’ACQUISITION DE B
La Commission rappelle que les VNC des actifs de B dans les comptes consolidés préalablement à la réévaluation peuvent inclure des écarts d’évaluation qui auraient été comptabilisés lors de la première consolidation de la société B dans les comptes consolidés du groupe (voir ci-avant).
Dans ce cas, l’écart de réévaluation relatif aux actifs corporels et financiers de B, inclus dans l’écart de réévaluation figurant dans les capitaux propres consolidés, est égal à la différence entre :
- les valeurs réévaluées des actifs corporels et financiers de B telles que déterminées dans les comptes individuels, éventuellement ajustées pour tenir compte des spécificités des comptes consolidés (réévaluation des immobilisations corporelles détenues en crédit-bail, prise en considération des impôts différés...) ;
- et les valeurs de ces actifs dans les comptes consolidés préalablement à la réévaluation, ces valeurs pouvant inclure, le cas échéant, les écarts d’évaluation liés à l’acquisition de B.
Dans le cas où la société B ne serait pas détenue à 100 %, la réévaluation de ses actifs aurait pour effet de réévaluer les intérêts minoritaires à hauteur de la quote-part de l’écart de réévaluation leur revenant.
PAS DE RÉÉVALUATION DE L’ÉCART D’ACQUISITION COMPTABILISÉ LORS DE LA PREMIÈRE CONSOLIDATION DE B
Par ailleurs, l’éventuel écart d’acquisition (différence entre le coût d’acquisition de la société B et la part de la société A dans les actifs et passifs identifiables évalués de B, à la date d’acquisition) comptabilisé lors de la première consolidation de la société B ne peut faire l’objet d’aucune réévaluation (puisqu'il est comptabilisé en immobilisation incorporelle) et doit être maintenu à sa VNC historique dans les comptes consolidés.
Il en est de même pour tout autre actif incorporel identifié lors du processus d’allocation du coût d’acquisition.
Traitement comptable de l’écart de réévaluation sur les titres C
Principes essentiels de la mise en équivalence : rappels
C est une entité consolidée par mise en équivalence (MEE). La mise en équivalence, qui fait partie des trois méthodes de consolidation, s'applique aux entités sous influence notable (voir ci-avant).
Les capitaux propres et les résultats des entreprises mises en équivalence sont évalués selon les règles générales de consolidation, définies pour l’intégration globale, sous réserve de dispositions particulières, notamment (CRC, règlt 99-02, § 290) :
- à la date de première consolidation, la MEE consiste à substituer, à la valeur comptable des titres, la quote-part qu’ils représentent dans les capitaux propres de l’entreprise consolidée (c. com. art. R. 233-3 ; CRC, règlt 99-02, § 291). Elle peut être effectuée selon la méthode de la consolidation par paliers ou selon celle de la consolidation directe au niveau de l'entité consolidante ; - lors des consolidations ultérieures, la valeur des titres mis en équivalence est égale, à chaque fin d'exercice, à la quote-part des capitaux propres retraités de l'entreprise consolidée à laquelle ils équivalent (CRC, règlt 99-02, § 292). La variation de ces capitaux propres augmente ou diminue donc la valeur des titres mis en équivalence à la clôture de l’exercice précédent.
Élimination, dans les comptes consolidés, de l'écart de réévaluation sur les titres C comptabilisé chez A
ÉLIMINATION DES TITRES DE PARTICIPATION C POUR LA TOTALITÉ DE LEUR VALEUR
Conformément aux principes rappelés ci-avant, dans les comptes consolidés, la valeur comptable des titres de participation C détenus par A est remplacée par la quote-part des capitaux propres retraités de C à laquelle ils équivalent (valeur d'équivalence des titres C). Dès lors, les titres C détenus par A sont éliminés pour la totalité de leur valeur, y compris pour la portion relative à la réévaluation libre.
La valeur d’équivalence des titres C figurant désormais au bilan inclut, de fait, l’écart de réévaluation généré par la réévaluation libre des actifs de C, dans la mesure où la réévaluation libre est étendue à l’ensemble des entités consolidées du groupe.
MÉTHODE À SUIVRE
Ainsi, d’un point de vue pratique, dans les comptes consolidés, il convient :
- d’éliminer l’écart de réévaluation sur les titres C comptabilisé dans les comptes individuels de A ; - puis, en contrepartie, de ramener les titres de participation C à leur valeur comptable historique (voir ci-avant) ; - et enfin, de mettre en équivalence les titres C sur la base des capitaux propres retraités de C, incluant l’écart de réévaluation constaté lors de la réévaluation libre des immobilisations corporelles et financières de C.
L’éventuel écart d’acquisition comptabilisé lors de la première MEE de C ne peut faire l’objet d’aucune réévaluation (voir ci-avant), et doit être maintenu à sa VNC historique dans les comptes consolidés.
Traitement comptable de l’écart de réévaluation sur les autres titres non consolidés
Les titres de participation non consolidés détenus par A sont inclus dans le bilan consolidé parmi les immobilisations financières. Dans la mesure où la réévaluation libre opérée dans les comptes individuels est maintenue dans les comptes consolidés, les titres de participation non consolidés sont intégrés dans le bilan consolidé pour leur valeur réévaluée.
La valeur réévaluée des titres de participation correspond à leur valeur d'utilité
La valeur à retenir pour procéder à la réévaluation est la valeur actuelle des actifs concernés (c. com. art. L. 123-18 ; PCG art. 214-27).
S'agissant des titres de participation, la valeur actuelle correspond à leur valeur d’utilité, représentant ce que l’entité accepterait de décaisser pour obtenir cette participation si elle avait à l’acquérir (PCG art. 214-6 et 221-3). La valeur d’utilité prend en considération la valorisation de l’entité concernée dans son ensemble.
Le cas échéant, la valeur réévaluée des titres de participation non consolidés d'une entité peut intégrer la réévaluation des éléments incorporels détenus par cette entité, dans le cadre de cette valorisation globale.
Une telle démarche ne saurait être confondue avec une réévaluation séparée des immobilisations incorporelles, explicitement interdite par les textes.
Maintien, dans les comptes consolidés, de l'écart de réévaluation sur les titres non consolidés comptabilisé chez A
Les titres de participation non consolidés étant intégrés dans le bilan consolidé pour leur valeur réévaluée, l’écart de réévaluation issu de leur réévaluation est maintenu en l’état dans les comptes consolidés.
Information à donner en annexe
Une information devra être donnée en annexe des comptes consolidés, notamment au titre des méthodes de réévaluation appliquées, du montant de l’écart de réévaluation constaté, et de son incidence sur les amortissements et dépréciations relatifs aux immobilisations réévaluées.
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