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  • Photo du rédacteurDavid Sanglier

Financer le haut de bilan

La partie haute du bilan se compose de l'actif immobilisé et, au passif, des capitaux propres et des dettes à moyen et long termes.


Qu’est-ce que le « haut de bilan » : rappels

Le « haut de bilan » correspond aux éléments à long terme inscrits dans le bilan comptable.


Du côté de l’actif, le haut de bilan est notamment constitué des immobilisations et, au passif, des fonds que l’entreprise doit à ses investisseurs ou à la banque sur le long terme (capital social, réserves, emprunts bancaires, etc.). Le haut de bilan est un gisement de valeur important et l’optimiser permet d’assurer la pérennité de l’entreprise sur la durée.

Les emprunts de long terme (c’est-à-dire dont l’échéance est supérieure à 12 mois) servent généralement à financer les immobilisations. Examiner ces deux éléments en regard l’un de l’autre permet d’assurer une certaine cohérence.


Les besoins de financement à moyen et long termes jalonnent la vie de l’entreprise

Tout au long de la vie de l’entreprise, se pose la question des moyens financiers à moyen ou long terme lui permettant d’assurer son développement, de pérenniser son activité ou de faire face à des difficultés majeures. À titre d’illustrations, on peut citer quelques projets, susceptibles de nécessiter la mise en place de tels financements :

  • un plan de développement ambitieux ;

  • un projet innovant réclamant plusieurs années de recherche et développement avant de générer le moindre revenu ;

  • un accident de parcours venant diminuer notablement les fonds propres de l’entreprise ;

  • l’acquisition d’une société pour compléter ou renforcer son offre.

Les différents outils de financement du haut de bilan

Différentes typologies d’instruments

EMPRUNTS, AUGMENTATIONS DE CAPITAL, INSTRUMENTS HYBRIDES

Deux grandes typologies d’instruments permettent de répondre aux besoins moyen et long termes :

  • les emprunts, avec l’enjeu d’avoir les cash flows suffisants pour les rembourser, au risque de se mettre en situation difficile ;

  • les augmentations de capital par les actionnaires existants (fonds propres ou comptes-courants) ou l’ouverture à des tiers personnes physiques, fonds institutionnels, voire marchés boursiers (introduction en bourse et émissions secondaires), avec les conséquences induites en termes de dilution et de gouvernance.

Entre ces deux grandes typologies, existe une palette d’instruments hybrides, à l’instar des obligations convertibles, des obligations remboursables en actions (OCA, ORA), etc.


FINANCEMENTS DÉSINTERMÉDIÉS


Les dernières années ont été marquées par l’émergence de financements désintermédiés, poussés par de nouveaux acteurs technologiques telles que les plateformes de crowdlending et de crowdfunding.

Rappelons que le crowdlending est une sous-catégorie du concept, plus large, de crowdfunding (en français, financement participatif). Les plateformes digitales de financement participatif doivent disposer d'un agrément. Elles permettent aux particuliers de prêter en direct à des PME sélectionnées. Ces opérations de prêts à des PME souscrits par la « foule » (crowd), parfois accompagnée par des institutionnels (banques, mutuelles, investissant en commun sur des plateformes sélectionnées de crowdfunding) concernent en principe des entreprises offrant une certaine lisibilité dans le temps (existence d’un historique, niveau minimum de chiffres d’affaires, atteinte de la profitabilité, cash flows positifs sur les années à venir) et pouvant justifier d’une capacité d’endettement (voir notre analyse détaillée ci-après).

Il peut être délicat de définir la solution la plus adaptée au profil de l’entreprise et de ses actionnaires-dirigeants. Il s’agit de trouver la combinaison qui permettra à l’entreprise de maintenir ou de rétablir une structure financière saine en termes termes de ratio d’endettement et de couverture des éventuels frais financiers, en accord avec les préférences des dirigeants.


Les dettes bancaires et autres emprunts à moyen ou long terme

LES EMPRUNTS BANCAIRES

L’emprunt bancaire reste, encore aujourd’hui, la solution de financement haut de bilan la plus usuelle, hors cas particuliers comme les start-ups ne disposant pas de revenus et de garanties suffisants, ou les sociétés en difficulté.

Non dilutif, il est particulièrement adapté aux situations où le financement s’adosse à un actif sous-jacent, qu’il s’agisse d’investissements matériels ou de l’acquisition d’une entreprise. Le principal enjeu est de générer les flux de trésorerie (« cash flows ») suffisants pour couvrir à la fois le paiement des intérêts et le remboursement de la dette sur la durée.

Des garanties peuvent être exigées, comme le nantissement de l’immobilier, de l’équipement ou des titres de la société. Le dirigeant doit veiller à ce que celles-ci ne soient pas disproportionnées et éviter au maximum les garanties personnelles.

SOLUTION

Pour répondre à cette problématique, une solution consiste, par exemple, à recourir à une société de caution mutuelle, établissement de crédit sous forme coopérative constitué de commerçants, artisans, industriels et professions libérales, se portant garant des prêts contractés par ses adhérents.

EMPRUNTS ET GARANTIES BPI FRANCE

BPI France a mis en place ces dernières années plusieurs dispositifs permettant de soutenir le développement des entreprises. Deux grandes catégories sont à distinguer.

Les prêts BPI France

Ces prêts se distinguent des prêts bancaires traditionnels par l’absence de garanties sur les actifs de l’entreprise ou de garanties personnelles du dirigeant. Ceux-ci viennent compléter un financement bancaire ou un apport en fonds propres pour un montant équivalent. D’une durée de 5 à 7 ans, ils intégrent un différé de remboursement d'1 à 2 ans.


Les garanties BPI France

Elles permettent de garantir 40 à 70 % de l’emprunt.


Tableau de synthèse


EURO PP ET PLACEMENT PRIVÉ

Ressemblant, dans son essence, à un financement bancaire dans la mesure où il est non dilutif, le placement privé auprès d’investisseurs institutionnels au travers de l’Euro PP est particulièrement adapté aux entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Il offre une alternative long terme pour des montants supérieurs à 10 M€, et ne nécessite pas de notation ou de cotation. Le remboursement est le plus souvent :

  • in fine, ce qui permet de se concentrer à court terme sur le remboursement de la dette bancaire ;

  • sans prise de garantie, ce qui est un atout pour les projets de croissance incluant de l’investissement immatériel.


PLATEFORMES DE PRÊTS (« CROWDLENDING »)

Autres formes de financement désintermédié apparues suite à l’ouverture du monopole bancaire en France en 2014, les plateformes de prêts (« crowdlending », voir définition ci-avant) donnent un accès rapide (en moins d’une semaine) au financement et ce, pour des entreprises établies de toutes tailles.

L’entreprise peut tester son éligibilité à ce type de financement sur un site Internet. Certaines plateformes financent également des rachats de fonds de commerce, des acquisitions ou des opérations à effet de levier (OBO, LBO, etc.) en complément de prêts bancaires ou de dettes mezzanines (pour rappel le terme « dette mezzanine » désigne la dette la plus risquée, dont le remboursement est subordonné à celui de la dette dite senior).


PRÊTS INTERENTREPRISES

Encore méconnus, les prêts interentreprises ont été introduits depuis le 6 août 2015 (loi dite « Macron », 2015-990 du 6 août 2015, JO du 7) et leur durée maximum a été allongée à trois ans par la loi PACTE (loi 2019-486 du 22 mai 2019, JO du 23, art. 95 et 96 ; c. mon. et fin. art. L. 511-6, 3 bis modifié). Ils permettent aux SARL et sociétés par actions dont les comptes sont certifiés par un commissaire aux comptes (CNCC, avis technique : attestation relative aux prêts interentreprises, juin 2017) de réaliser des prêts à des entreprises remplissant certaines conditions et avec lesquelles elles entretiennent des liens économiques.

Le prêt peut être octroyé uniquement si l’entreprise prêteuse ou un membre de son groupe, d’une part, et l’entreprise emprunteuse ou un membre de son groupe, d’autre part, sont économiquement lié(e)s. Ce dispositif peut, par exemple, trouver à s’appliquer quand les entités font partie d’un même groupement d’intérêt économique (GIE) ou d’un groupement attributaire d’un marché public ; dans le cas d’une subvention publique versée dans le cadre d’un même projet associant les deux entreprises ou s’agissant d’un sous-traitant de l’entreprise prêteuse (ou d’un membre de son groupe) ; d’une concession de licence d’exploitation de brevet ou de marque, de franchise ou de contrat de location-gérance avec l’entreprise cliente.

Les modalités, en termes de critères et de montants, étant très strictes, il convient de vérifier si les entreprises partenaires peuvent se soutenir l’une l’autre par ce biais (voir site de la Banque de France entreprises.banque-France.fr, par exemple).


CRÉDIT-VENDEUR

Dans le cadre de projets de croissance externe (acquisition d’une société), il est utile de se rappeler l’opportunité offerte par le crédit-vendeur.

Ce dernier permet le paiement échelonné par l’acquéreur d’une partie du prix. Limité à 50 % du montant, au maximum, ce prêt de 1 à 3 ans permet d’alléger la charge de financement des premières années.


Augmentations de capital et comptes courants d’associés

LES DIFFÉRENTES SITUATIONS

Une des premières sources de financement des entreprises est et reste, notamment au démarrage de l’entreprise ou lors du passage de certains paliers, l’apport en capital par les actionnaires-dirigeants.


À ceux-ci peuvent, par ailleurs, s’ajouter :

  • la famille et les proches (« love money ») ;

  • des associés qui rejoignent l’aventure et s’impliquent opérationnellement ; -des salariés (actionnariat salarié) ;

  • des business angels [non opérationnels, pouvant pour certains avoir un rôle de conseil(s)] ;

  • des fonds d’investissement (pouvant avoir un rôle plus ou moins actif) ;

  • voire le public dans le cas de sociétés déjà cotées ou introduites en bourse pour la première fois.

Les fonds propres apportés constituent un signal positif, qui permet de faire levier auprès d’autres acteurs du financement, notamment bancaires.

Parfois voulue dans le cadre du développement, l’augmentation de capital peut, dans des situations extrêmes, devenir une nécessité afin de consolider une structure financière tendue (ratio d’endettement excessif) ou des capitaux propres négatifs (obligation légale de recapitaliser dans un délai de deux ans une entreprise dont les fonds propres sont inférieurs à la moitié du capital social).

Enfin, la cession de l’entreprise à un autre acteur industriel peut aussi apparaître comme une solution aux enjeux de financement, offrant à certaines entreprises les moyens de leur développement.


LE CAS PARTICULIER DES ENTREPRISES COTÉES

Dans le cadre d’une stratégie d’évolution du capital, l’appel public à l’épargne, au travers d’une cotation boursière (introduction en bourse) ou d’une émission secondaire (augmentation de capital ultérieure), requiert une attention particulière.

C’est, pour l’entreprise patrimoniale, autant un instrument de communication business et de visibilité marché qu’un instrument de financement à proprement parler. L’actionnaire-dirigeant doit réaliser qu’au-delà de l’obtention des fonds s’enclenche un vrai travail de gestion au quotidien de la relation avec les investisseurs pour répondre à leurs attentes, dynamiser le cours de bourse, rassurer quand certaines difficultés apparaissent et sont, de fait, de notoriété publique et pallier aussi certains mouvements de marché qui pèsent sur le cours de bourse alors que les fondamentaux de l’entreprise n’ont pas bougé.

Certaines entreprises patrimoniales, que nous côtoyons ou accompagnons, ne réalisent qu’après coup le travail nécessaire pour développer et maintenir un cours de bourse, au-delà de l’obtention du financement. Ceci peut oblitérer des levées ultérieures de financement quand le cours est maintenu sous pression.


POINTS D’ATTENTION

Mûrement réfléchir l’évolution d’actionnariat induite

Dans tous les cas de figure, l’entrée au capital de l’entreprise de nouveaux actionnaires va se traduire par un partage, voire une perte de contrôle voulue ou subie par les actionnaires-dirigeants. C’est donc une opération de financement qui doit être mûrement réfléchie et dépendra fortement, à la fois dans ses montants et modalités, de la personnalité des actionnaires-dirigeants, de leurs critères et priorités.

En pratique, l’entrée de tiers au capital prend souvent la forme d’un mix de capital (émission de nouveaux titres), d’instruments hybrides (quasi-fonds propres), au premier rang desquels figurent les obligations convertibles, ou de comptes courants d’associés (formes de « prêts » par les actionnaires rémunérés ou non, et remboursables facilement si la trésorerie de l’entreprise et les autres engagements contractuels, notamment auprès des banque le permettent).

Dans le cadre d’opérations à effet de levier, certains partenaires financiers insisteront pour que les comptes courants d’associés soient capitalisés, c’est-à-dire transformés en capital social.


Tenir compte des critères, attentes, et contraintes de chacun

L’enjeu, au-delà du pourcentage accordé aux nouveaux actionnaires sur la base du montant levé et de la valorisation de référence retenue, est pour l’actionnaire-dirigeant de garder à l’esprit :

  • son horizon de sortie à plus ou moins court ou long terme ;

  • son critères en termes de retour attendu (et l’éventuelle pression induite pour l’entreprise de « délivrer ») ;

  • les clauses en tous genres, si cela ne se passe pas comme prévu (ce qui peut se traduire pour l’actionnaire-dirigeant par la perte de l’entreprise qu’il a fondée).

Ces différentes stratégies de financement par dette et capital vont se combiner en fonction du montant requis par l’entreprise patrimoniale. La structuration dépend de la situation spécifique de l’entreprise (d’où l’importance du diagnostic initial), et des priorités définies ou des compromis acceptés par l’actionnaire-dirigeant.

Il est essentiel que ces priorités et éventuelles contraintes soient clairement définies en amont afin d’éviter de consacrer du temps à la recherche de financements dont les conditions et modalités ne pourront pas se concrétiser.


Bien choisir l’entité dans laquelle on investit

Dernier point, parfois négligé dans la recherche et la structuration des financements haut de bilan : le choix de l’entité retenue. Le constat est que certains acteurs du marché ont du mal à traiter certaines situations hybrides. Dans le cas d’entreprises mêlant activités traditionnelles et activités innovantes à forte consommation de cash, par exemple, il devient nécessaire de filialiser la nouvelle activité innovante. Celle-ci est plus facilement perçue comme une « start-up », et les fondamentaux de l’activité traditionnelle sont préservés.

Un spin-off (scission de l’activité) peut même être envisagé, ce qui permet d’accéder à des financements « venture » non accessibles à une entreprise établie.

Dans d’autres cas, il sera plus judicieux de monter le financement haut de bilan au niveau de la société mère, qui fera ensuite un prêt à sa filiale.


Se faire accompagner en cas de besoin

Pour l’actionnaire-dirigeant de l’entreprise patrimoniale, obtenir les financements haut de bilan appropriés n’est pas tant (ou pas seulement) une question d’outils. Il s’agit davantage :

  • 1. d’anticiper,

  • 2. de dimensionner correctement les ambitions et éventuellement d’en ajuster la mise en œuvre dans le temps, et

  • 3. d’échanger avec les contreparties les plus adaptées à sa situation, ce qui signifie avoir les bons réseaux.

C’est dans cette dernière dimension que se faire accompagner prend tout son sens, à la fois pour activer les leviers pertinents et entrer en relation avec les interlocuteurs appropriés.

Dernier point enfin, il faut rester confiant car il y a toujours une solution et c’est bien souvent une réponse « business ». Celle-ci renvoie à un travail sur les fondamentaux de l’activité et du business model de l’entreprise patrimoniale, à une vision claire et à un focus sur l’essentiel. Ces éléments rassureront les financeurs sur la capacité de l’entreprise à lever le financement, à générer les cash-flows nécessaires au remboursement de la dette et au paiement d’intérêts, et à satisfaire ses nouveaux investisseurs. Ils offriront également à l’actionnaire-dirigeant la visibilité et la sérénité pour se concentrer sur l’activité de l’entreprise au lieu d’être à la recherche permanente de solutions de financement pour faire face à ses échéances.


Dette versus capital : synthèse des enjeux



Autres pistes à garder en perspective


Face à un besoin de financement majeur, bon nombre d’entreprises patrimoniales ne pensent pas à l’évidence : céder des actifs, activités, voire filiales devenus non stratégiques, afin de dégager du cash qui servira au financement d’un projet innovant ou d’une prochaine acquisition en phase avec la stratégie actuelle de l’entreprise.


Cela suppose la connaissance fine des tenants et aboutissants de chaque activité ou ligne de produits ou services, de leur performance et de leur adéquation aux objectifs actuels de l’entreprise. Cette stratégie, utilisée de façon active par les grands groupes, peut se révéler pertinente pour certaines entreprises patrimoniales de taille plus modeste (PME, ETI).


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